Validé par Aly (:

C’était un de ces soirs où tout vous semble noir, un de ces soirs glacial où même la plus charmante des compagnies n’est pas souhaitable. Je n’avais aucune idée de l’heure qu’il pouvait être et puis qu’importe. Me retrouver seule quelques instants me faisait du bien. La chaleur émanant du feu de camp, les rires et les chants des habitants de l’île m’étouffaient et m’étaient devenus insupportables. Je crois que l’on a tous eu dans sa vie un moment comme celui-ci, où l’on ressent le besoin de se retirer du reste du monde pour faire le point sur soi-même. En l’occurrence, j’avais besoin de faire le point sur les trois dernières années passées sur l’île. Tous ici avaient plus ou moins réussis à se reconstruire une vie – heureuse ou malheureuse - , s’étaient crées des amis ou même plus, et semblaient avoir appris à se sentir comme chez soi, perdus au beau milieu de cette immensité de sable, un nom de plus porté disparu. Je faisais partie de ces gens là. Je m’étais faites une raison et gardais bien à l’esprit que jamais je ne reverrais New York. Tout espoir de retour m’avait quitté, il y a de ça bien longtemps … Mais ma vie urbaine me manquait-elle ? Et la pollution ? Les taxis ? Le stress ? Non, en effet. Je ne sais par quels moyens j’avais réussi à ne pas regretter mon ancienne vie. Ce dont je me rendais de plus en plus compte, c’est que mes souvenirs la concernant devenaient de plus en plus flous, et je semblais – malgré moi – vouloir les effacer de ma mémoire.

Durant cette énième et courte méditation dont je n’avais tiré aucune conclusions et qui ne m’apporteraient sans doute jamais de réponses concernant ce dont j’avais réellement besoin pour être heureuse, un bruit de branche venant de se briser me fit sortir de ma rêverie. Je constatais alors que mes jambes m’avaient portée dans un endroit qui m’était jusqu’à lors inconnu. Des falaises me faisaient face. Jamais de mes yeux je n’avais vu un spectacle pareil. A la fois effrayant, triste et beau, ressemblant plus un une peinture qu’à la vie réelle. Dans le berceau de la nuit fraîchement tombée, seules les étoiles et la lune permettaient de discerner ces ombres gigantesques, qui vous attiraient vers le bas afin de vous faire disparaître dans l’obscurité. Etrangement, je me sentais à mon aise ici. Bien plus qu’autour du feu de camp, quelques temps auparavant. Une légère brise semblant murmurée des mots incompréhensible me caressait de temps à autres mes jambes nues, ne portant qu’une légère robe appartenant à une naufragée. Energiquement, je frottais mes mains l’une contre l’autre afin de me réchauffer, puis resta ainsi silencieuse à contempler le ciel, me laissant vaquer à une nostalgie inconnue … Me demandant finalement comment allais-je faire pour retrouver mon chemin, ne sachant pas le moins du monde où je me trouvais. Mais encore une fois, ce caractère de je m’en-foutiste pris le dessus et cette inquiétude se dissipa vite.

Occupée à surveiller avec une attention soutenue chacun de mes pas pour ne pas trébucher, je me dirigeais de l’avant, voulant voir le paysage d’un peu plus près, la curiosité étant un trait qui me correspondait à merveille. Qu’importe le danger et l’obscurité. Ici, au milieu de nulle part, je me sentais vivante.