Je suis née un beau matin. Quelques heures après le chant du coq.
Le soleil était déjà haut dans le ciel lorsque mon père a décidé de m'octroyer comme prénom celui d'un ange , faisant de moi son enfant bien aimé,
Caliel Aarun. J'étais le fils d'un grand chirurgien et d'une styliste. J'étais un
Kohen. J'étais née juif mais avec le temps ça allait changer.
Avec le temps, j'allais changer.Avec le temps , plus rien n'allait fonctionner.
" Papa , maman , je suis désolé de vous décevoir , de faire pleuvoir sur vous des torrents de méchanceté...d'ingratitude et d'incertitude...j'en ai marre que vous vous demandiez : " Est-ce encore le fils que nous avions désiré ? "...pardonnez-moi , encore une fois...d'être celui que vous auriez préféré oublier..."Il y a une époque où ma religion avait une importance , où aucune croyance n'égalait la mienne...
J'étais étroit. J'étais froid. Un brin arrogant. Complétement dédaignant.Un salop.Un salop qui "croyait ". Qui croyait , aveuglément.En une nuit , un cataclysme s'est abattu sur moi. Brisant mes rêves, mes volontés...mes préjugés ...me frappant à coup de regrets.Et là : j'ai ouvert les yeux , pendant que je perdais l'usage du droit...qu'avais-je fait ?
J'avais tué. J'avais tué une vie humaine. J'avais pris une âme chère à son créateur. J'avais volé un nom, un prénom, un sexe...elle avait seize ans , elle s'appelait Sharon...elle s'appelait Sharon.Elle était blonde...cinq secondes au lieu de deux...mon temps de réaction avait été trop long.Sa tête était passée au travers du pare brise...brisant la vitre, son crâne et
mon cœur.
Tout cela ...de mes propres mains.
0,80 g/L
Chiffre substantiel.Tatoué à jamais sur ma peau , en gros sur mon poignet...de sorte de ne jamais oublier, l'erreur que j'avais fait.J'avais commis l'irréparable ...l'inexcusable.
C'est une semaine après qu'en plus de la honte et du regret qui m'habitaient ,on a commencé à me nommer : Le balafré.Un jour je suis devenu ma propre religion Perdu dans l'étendue de ma culpabilité , je me suis ouvert à d'autres perceptions, je ne voulais plus sentir toute cette douleur. Un Saint est alors passé par là m'amenant doucement vers le chemin du
Nirvana.J'essayais par ce moyen d'atteindre un état de plénitude. Je l'ais trouvé en me métamorphosant. Ce qui ne fut pas du goût de mes parents. Comment est-ce que leur enfant avait-il autant dévié ? Quel mécréant je faisais. Lequel des deux était le pire ? Le père pour avoir fait cocu la mère ? Ou moi pour avoir trouver une façon de me soulager ? La mère pour avoir longtemps médit ? Ou moi pour avoir voulu l'arrêter ?
Pour eux , j'étais condamnable , une sentence à perpétuité. Je n'étais plus des leur , ils me l'ont bien spécifié...:
" Change de nom , tu déshonneur notre famille...comment ose-tu adorer les vaches et les brebis ? ". Buté , égaré , peu importait les adjectifs...je suis parti. Je suis parti , emportant avec moi mes pêchés et la haine qu'ils me vouaient...même si je reste persuadé que ma mère ne cesse de m'adorer.
Quatre ans se sont écoulés depuis. Je ne l'ai pas revu. J'essaye de les appeler tout les ans lors du
Pessah ça ne fonctionne pas...apparemment on aurait oublier de leur apprendre le pardon dans leur confession. Je continus moi. Je continus à les aimer , inconditionnellement. Exactement : en toute circonstance.Tout les jours que " Dieu " fait.
Est-ce que je vous ais dit que je ne suis absolument plus le même ?
J'ai su grâce à mon accompagnateur changer de style de vie. Changer de façon de faire. Physiquement , je reste beau malgré cette cicatrice de 25 cm de long qui recoupe mon front l'œil droit et la moitié de ma joue...je suis un peu comme Harry Potter ou Scar dans le roi lion.
Autrefois ( j'utilise cette expression parce que cela me semble si loin...) j'étais matérialiste. Tout ce qui m'intéressais c'était les tunes , les belles brunes et les fringues signées. Je n'avais d'yeux que pour les belles choses . J'étais hermétique à ce qui ne me semblais pas parfait. J'étais affreux. Je n'utilisais mon corps que pour frimer , je ne faisais rien de concret. J'étais incompétent.
Maintenant , j'ai un but dans la vie. Je veux étudier l'économie et la gestion pour ouvrir mon propre commerce , pour faire profiter les gens qui vivent dans l'insalubrité...je veux être un ange plutôt qu'un saligaud . Un aigle plutôt qu'un charognard . Je veux être quelqu'un de meilleur. Bouddhiste...et fier , pour de bonnes raisons.
Mentalement il y a désormais un fossé entre ce que j'étais et ce que je suis. Je ne parle plus pour ne rien dire. Mes paroles sont devenues couteuses. S'il m'arriver d'enchainer les phrases vous pourriez prendre cela comme un luxe. Un cadeau que je vous offrirai , c'est que je vous considérai comme digne d'intérêt dans ce monde plein de futilités.
- Caliel , 'parait que tu n'révise jamais ? Tu fais comment pour ne pas te ramasser aux examens ?!Avant on disait que j'étais doué. Que j'étais l'Einstein de la famille . Le mec à suivre , le mec à retenir. Je n'étais que le reflet des volontés de mes parents. Aujourd'hui je suis le reflet de moi même : Caliel Aarun. Je suis moi , ça m'est amplement suffisant.
Je n'ai rien d'autre à ajouter. Cambridges ça n'a pas toujours été mon premier choix. Si je suis là c'est uniquement par esprit de contradiction, le grand Joseph Kohen alias mon père disait souvent : " Si tu devais quitter le continent pour fuir cette université , je ne t'en empêcherai pas...mon fils". Mon fils , j'avais un père...austère , aimant...prise de tête. Je lui rend hommage à présent.
Je n'ai rien d'autre à ajouter. Je pense avoir le temps de m'épancher sur le triste de mon passé, les promesses de mon avenir , sur l'harmonie de mon présent...
alors ? Je suis accepté ? La meilleure façon de recouvrer la liberté, c'est de rompre les chaînes qui blessent le cœur et de mettre un terme à son tourment.