code validé, Amber.

C'était l'aube qui, se levant pleine de sa rosée, m'avait vu m'éveiller. Fraîche et peu accueillante, elle était cependant là, seul témoin de mon éveil à la vie. C'était suite à une nuit longue et pénible, pleines de rêves perturbants et impossibles à mémoriser, que j'avais péniblement ouvert un œil. J'étais courbaturée, l'humidité avait pénétré mes membres et je me sentais engourdie. Avec peine, je tentai de me dresser sur mes quatre pattes sans basculer, et lorsque je recouvrai mon équilibre, m'extirpai de la tanière des Guerriers. La chaleur des corps enroulés sur eux-mêmes me quitta instantanément et je frissonnai en prenant conscience du froid sur mon corps.

Tout en étirant et secouant mes pauvres pattes endolories, je me traînai avec un minimum de dignité vers la pile de nourriture qui se voyait considérablement basse. Je saisis une grive, espérant que le souvenir de mes toutes premières chasses me redonnerait de l'énergie. Je me laissai ensuite tomber sur le côté de la clairière et pris quelques bouchées. Le camp était effroyablement tranquille et vide. Pas un souffle de vent, aucun chat visible de l'extérieur, et pour couronner le tout, une brume grise qui cachait un ciel de la même couleur. Les centaines de milliers de microscopiques particules d'eau, lévitant dans les airs, semblaient m'assaillir de partout, trop contentes de voir de l'animation.

Engloutissant avec un certain effort la dernière bouchée, je pris le temps de me nettoyer entièrement. Durant tout le temps que prit ma toilette, je n'entendis rien et ne vis aucun mouvement. C'en vint insupportable et je finis par me lever, m'ébrouer et me diriger d'un pas vif et rapide vers le tunnel d'ajoncs marquant l'entrée du camp. À peine avais-je monté le ravin que je pris un pas de course. Sous mes coussinets, la terre était dure et gelée, accentuant à l'extrême mes bruits de pas - j'avais la certitude que l'on entendait un bruit de cheval aux Hautes Pierres. Si j'avais évalué la possibilité de chasser un peu pour réapprovisionner la pile de nourriture, cette idée tombait maintenant à l'eau. Je ne m'arrêtai pas pour me questionner à propos de là où j'allais. Tout au contraire, je pris encore de la vitesse et filai telle une étoile filante à travers la forêt.

Je vis bientôt les arbres se raréfier quelque peu, indiquant ma position. Puis, je sautais par-dessus le ruisseau et le territoire de mon Clan prit fin. Heureusement, je ne me retrouvai pas en terrain ennemi et pis poursuivre ma course. Mes pattes renoncèrent à suivre le rythme effréné qui allait crescendo tandis que je dévalai la pente près des Quatre Chênes. Je finis par m'arrêter, glissant et dérapant sur quelques mètres, mon corps se balançant d'un côté et de l'autre, pour finalement terminer en beauté immobile à une longueur de moustache du Promontoire.

Je levai la tête et soudain le ciel s'assombrit. Je crus que mes yeux me jouaient un tour, mais partout autour de moi se cachaient les ombres malignes de la nuit. Je redressai à nouveau le regard et désormais je sentais l'odeur épique qui se constituait d'un mélange des odeurs de chaque Clans.Je sentis contre ma fourrure le déplacement d'air généré par une multitude de mouvements. Je sentis m'envahir la chaleur d'un grand nombre de chats... Et l'instant d'après, le brouhaha des conversations me cassa les oreilles suite à un long silence. Une Assemblée... Très loin, dans le ciel, la Toison Argentée scintillait presque furieusement. Au sommet du Promontoire, trois ombres se détachaient à peine. L'un deux me fit un signe de la queue pour m'inviter à grimper. Moi ?

Quelque chose me poussait à vouloir monter, à accéder à la requête de ce chat qui devait être un Chef, ou peut-être à une ambition quelconque... Je fis un pas, puis deux. Le prochain pas me mènerait sur la pierre. Stupéfaite, je levai lentement la patte et la posait sur la roche dont la surface était froide. Mais alors je m'arrêtai et me demandai pourquoi je devais monter. Avais-je été témoin d'un élément clé pour tous les Clans ? Mon Chef était-il malade et le remplaçais-je momentanément ? Ou bien étais-je peut-être simplement devenue Chef ? Les questions se bousculaient violemment dans mes oreilles qui tambourinaient et grésillaient, se disputant la place à l'exaltation et à l'ambition.

Une odeur envahit soudain mon nez, plus forte que toute les autres, mais pourtant si faible... C'est alors que je remarquai que les odeurs, les sons et les sensations étaient plus faibles qu'à l'accoutumée. Les couleurs elles-mêmes étaient plus ternes et grisâtres. Bientôt tout cela disparut, et je me retrouvai là, en ce matin brumeux et froid, une patte sur le Promontoire prête à m'y hisser, une odeur connue se faufilant peu à peu dans mon organisme...