Emily n'a pas beaucoup confiance en elle. Elle se croit banale, pas très futée, alors qu'elle est sublime et qu'en général, elle s'avère très intelligente. Bon.. en général. Parfois elle peut prononcer des phrases qui n'ont strictement aucun sens, ou dire une énormité sans réfléchir, ou s'avouer incapable de comprendre un concept simplissime... mais en cours, elle fait partie des têtes de classe. Emily peut aussi être manipulatrice et très séductrice pour arriver à ses fins, et elle collectionne les conquêtes. Elle possède une nature sensible, même si elle ne montre pas toujours ses émotions. Éprise d'équilibre et d'harmonie, c'est une esthète. Ne manquant pas de sens pratique, friande d'indépendance et capable de prendre des responsabilités, elle est ambitieuse et montre une grande confiance en elle-même.
Elle n'est pas forcément docile à l'école, notamment lorsque les professeurs font preuve d'un autoritarisme auquel elle est allergique : c'est un « caractère » ! Son sentiment de justice est exacerbé. Aussi, à la moindre attaque injuste à ses yeux, se révoltera-t-elle, se dévoilant ainsi agressive et ingouvernable. C'est ainsi qu'on peut la voir tour à tour conciliante, sensible, active, disciplinée, perfectionniste, même, lorsque l'harmonie règne au sein de l'école. Puis rebelle, révoltée, agressive, prenant facilement le chemin de l'inactivité, de l'indolence ou de la paresse lorsqu'elle manque de motivations affectives.
Elle aime plaire, pouvant apparaître séductrice, parfois même narcissique. Elle aime aussi être nécessaire aux autres c'est son côté « protecteur » mais peut avoir une fâcheuse tendance à en faire trop, se mêlant plus qu'il ne convient des affaires des autres. Enfin, elle apprécie les belles choses (bijoux, toilettes...), le luxe, et tendra à rechercher un nid douillet et confortable. Sentimentalement, elle est sélective, donc difficile dans ses choix, ce qui peut la conduire aa une separation que pourtant, au fond d'elle-même, elle n'approuve pas. Elle est aussi exigeante, autoritaire et perfectionniste, aussi faut-il que l'élu soit souple, malléable et estimable.
Maintenant, parlons de la personne la plus importante au monde pour elle : sa soeur jumelle. Alice et Emily sont exactement semblables, et elles ont eu une relation fusionnelle jusqu'en classe de seconde, avant de se spécialiser chacune dans une filière différente et de se retrouver dans une classe différente, séparées. Elle a ainsi pris son indépendance envers sa soeur, mais continue à lui faire une confiance aveugle pour toutes sortes de décisions.

Emily Austen est une jolie fille, du genre qu'on ne croise pas chaque jour dans la rue, mais pas forcément belle à proprement parler. Ses cheveux courts, d'un blond très clair, mettent en valeur un visage d'elfe ou de lutin, malicieux, aux grands yeux noisette brillant d'une lueur toujours mutine, au-dessus d'un petit nez en trompette et d'une bouche toujours étirée par un sourire. Il est vrai que même quand Emily n'est pas heureuse, elle fait tout pour qu'on le croie encore, souriant dans les moments les plus difficiles pour un rien, riant de plus en plus fort quand elle va de plus en plus mal. Comme sa soeur jumelle, elle est plutôt petite et a la peau très pâle, mais aucun de ces deux traits ne la satisfait vraiment, contrairement à Alice, car elle aurait aimé être un peu plus grande et avoir un teint hâlé. Mais on ne peut pas avoir tout ce qu'on veut, dans la vie ! N'est-ce pas assez d'avoir un visage qui laisse une grande impression à ceux qui croisent les jumelles ?
Il existe un moyen de distinguer les jumelles Austen, et même plusieurs. Le plus utilisé, c'est de jeter un coup d'oeil au visage des jumelles. Emily a quelques taches de rousseur qu'on ne retrouve pas sur le visage de sa soeur, une différence infime, mais quand on est prévenu, on s'en rend assez rapidement compte. Si personne ne vous le dit, vous ne vous en rendrez toutefois probablement pas compte. Deuxièmement, Emily a un minuscule tatouage en forme d'étoile dans le creux de la cheville... mais encore faudrait-il qu'elle se promène pieds nus et en short, pour que vous puissiez le distinguer.

Nous est le plus beau mot de la langue française. Nous sommes nées, nous avons grandi, nous avons vécu. Emily Alice Austen et Alice Emily Austen, jumelles inséparables, c'est nous.
Nous sommes nées un beau jour d'automne, le 18 octobre, pour être précise, à Boston. Boston, vous devez bien connaître, c'est une grande ville et selon nous, la plus belle des Etats-Unis, et même une des plus sublimes villes au monde.
Nous sommes venues au monde dans une famille normale, avec un chien, Charlie, qui va jouer un rôle important dans la suite de mon récit, une voiture (une Ford, mais la voiture, quant à elle, ne joue aucun rôle dans notre histoire), et une petite maison confortable dans une banlieue pavillonnaire à une petite demi-heure de route du centre-ville de Boston.
Je n'ai pas grand-chose à dire de notre enfance, vous savez, elle n'avait rien de particulier, après tout. Je peux juste vous dire que nous étions heureuses et dans une famille aimante.
Les jumelles Austen, tout le monde en parlait, et personne ne nous différenciait, alors maman nous faisait généralement porter des vêtements brodés de nos initiales. Ce qui est une des pires idées qu'on puisse trouver, quand on a des jumeaux sous les yeux ; en effet, Alice et moi échangions souvent nos habits pour prêter à confusion, et cela nous était très utile, surtout pour échapper aux boulets qui nous agaçaient à longueur de journée.
Et maintenant, on en vient au chien. Il s'appelait Charlie, il était noir et vieux, tout décrépi, mais Alice et moi l'aimions énormément. Nous jouions beaucoup avec, et je ne pense pas qu'il faisait la différence entre nous, mais je persiste à affirmer, ne serait-ce que pour agacer ma chère soeur jumelle, que j'étais sa préférée. Bon, retournons à nos moutons ou on mourra de froid avant de se faire un pull en laine. Charlie est mort de vieillesse. Nous n'avions rien vu venir, nous n'avions que huit ans... mais c'est ainsi que nous avons découvert la mort. Je crois que je me souviendrai de ce jour toute ma vie. Nous avions tant pleuré, nous étions inconsolables, je m'en rappelle...
Vous vous demandez probablement pourquoi je m'attarde ainsi sur la mort d'un pauvre clébard qui nous est égal. Eh bien, pour tout dire, c'est juste que nous n'avons pas eu une vie passionnante, c'est le moins qu'on puisse dire. J'aurais pu vous raconter des voyages à l'autre bout du monde, la mort tragique de mes parents et le jour où ma tante a gagné au loto, mais ça aurait été un pur produit de mon imagination, et je me dois bien de vous raconter la vérité. Et à part la mort de Charlie quand il avait huit ans, je n'ai rien de particulier à vous narrer.
Bref. Venons-en aux choses sérieuses, notre entrée à Cambridge. Il était bien sûr inconcevable qu'une seule des jumelles Austen y soit admise, c'était soit les deux, soit aucune. Et par bonheur, ce furent les deux. Nous sommes venues à Cambridge pour poursuivre nos études, séparées pour la première fois de notre vie : si ma soeur Alice préférait la Santé et le Social, je me suis tournée vers la Littérature, surtout anglaise. Mais cette séparation ne nous empêche pas de vivre ensemble en dehors des cours, de partager bien des activités, d'avoir les mêmes amis (plus ou moins) et de continuer à nous vouer une confiance immense et réciproque.